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Grand paon de nuit
https://www.facebook.com/1018501730/videos/pcb.10229760758856048/457923193471309 Sauvetage d'un grand paon de nuit trouvé immobile sur une chaussée, déplacé sur un trottoir en herbe puis sur le rebord d'une véranda d'où il a pu s'envoler
mardi 19 décembre 2023
L'impardon, cité par Jean-Baptiste de Radonvilliers dans son Dictionnaire d'enrichissement de la langue française publié en 1842
L'impardon de Jean-Baptiste de Radonvilliers redécouvert récemment..
- Une réalité sans nom : l’impardon
- Christophe Perrin
- Dans Revue philosophique de la France et de l'étranger 2017/2 (Tome 142), pages 159 à 174
1 À A.
2 Impardon, substantif masculin calqué sur son contraire, le terme est forgé par un certain Jean-Baptiste Richard, dit de Radonvilliers, dans son dictionnaire pour l’Enrichissement de la langue française, où il se définit comme l’« absence de pardon », la « persistance dans la vengeance » et s’accompagne de cette note : « Le pardon est un acte de grandeur de l’âme et du cœur, il montre leur générosité et leur noblesse, il honore l’homme, le respectabilise et le vénérabilise. L’impardon n’est jamais qu’un acte de dureté, d’irascibilité, d’inhumanité et souvent de férocité, il dégrade le cœur et commictilise l’homme [1][1]Jean-Baptiste Richard de Radonvilliers, Enrichissement de la…. » Dans l’édition « considérablement augmentée » de cette œuvre qui paraît trois ans plus tard, l’entrée qui lui est consacrée offre de nouvelles précisions. S’il désigne toujours la privation de pardon, impardon y dit aussi son résultat, l’« état impardonné », après quoi l’auteur affirme : « Sans doute un trop facile pardon a ses inconvénients ; mais je préfère encore ce pardon à l’impardon, parce que l’impardon envenime les haines et implacabilise les vengeances [2][2]Jean-Baptiste Richard de Radonvilliers, Enrichissement de la…. » Apparu dans un ouvrage de néologismes destinés à « remédier à ce que l’on appelle pauvreté de la langue française [3][3]Jean-Baptiste Richard de Radonvilliers, op. cit. (1842),… », impardon n’est pourtant pas passé dans l’usage et a immédiatement disparu. Sans postérité, il reste aujourd’hui encore cet hapax sans équivalent courant, car, quoique sa souplesse lui permette largement la création de nouveaux vocables, l’allemand n’a jamais formé Unvergebung ou Unverzeihung, et si unforgiveness ou unforgivingness sembleraient presque faire florès dans plusieurs livres de psychologie ou de théologie édités ces dernières années aux États-Unis [4][4]Voir Hagin Kenneth, Unforgiveness, Broken Arrow, Faith Library…, désormais attestées par l’English Dictionary de Collins, qui en fait des synonymes [5][5]Voir url :… pour indiquer « the state of being unforgiving [6][6]Url :… », ces récentes inventions ne le sont malgré tout que par lui. Est-ce à dire que la chose à laquelle le mot impardon renvoie n’existe pas, sinon que l’idée qui grâce à lui se conçoit ne tient pas ? C’est tout le contraire et tout le paradoxe. Vu le mal que nous faisons aux autres et le mal que nous avons à nous le pardonner les uns les autres, l’impardon est une réalité… sans nom.
3 Que le mot ne soit donc pas employé lors même que la chose ne manque pas d’arriver ne peut signifier qu’une chose, à savoir que nous ne pensons pas cette chose, puisque nous ne pensons pas sans mot. Or, dans notre temps qui donne à penser, rien sans doute ne donne plus à penser que le fait même que nous n’y pensions pas. Plutôt que l’impardon, c’est en effet le pardon qui retient de prime abord et le plus souvent l’attention, cette chose dont la quotidienneté – se passe-t-il un jour sans que nous ne disions ‘pardon !’, c’est-à-dire sans que nous ne demandions pardon, même sous la forme simplifiée d’une formule de politesse expédiée ? – n’empêche en rien la difficulté – combien de jours se passe-t-il pour que, ce pardon, nous l’accordions, autrement dit nous l’annoncions, même en des mots qui ne sont pas « ego te absolvo a peccatis tuis, in nomine Patris, et Filii et Spiritus Sancti » ? Plutôt que l’impardon, c’est encore et toujours le pardon qui porte à la méditation, cette chose à laquelle nous préférons volontiers son idée, si belle à la réflexion – le pardon n’est-il pas un « baiser de paix [7][7]Bernard de Clairvaux, Sermones super Cantica canticorum, IV, 2… » pour la victime qui le donne ? – qu’elle la rend aussitôt si rebelle à la réalisation – comment le pardon ne serait-il pas un baiser de la mort [8][8]Le baiser de la mort, il bacio della morte, est le baiser donné… pour le bourreau qui le reçoit ? – qu’il devient bientôt aisé d’y renoncer. Aussi sont-ce souvent ceux qui parlent le plus du pardon qui l’exercent le moins, quand ceux qui le théorisent le moins le pratiquent le plus. Songeons à Jankélévitch, que l’idée a hanté et la chose paralysé, lui qui, après-guerre, en voudra toujours à l’Allemagne et ne voudra plus jamais avoir affaire à elle ; et songeons à Jésus, que la chose a occupé sans que l’idée ne l’ait préoccupé, lui qui ne jette pas la pierre à la femme adultère et remet ses péchés au paralytique qu’il remet sur pied. « Pur » ou « impur » [9][9]Vladimir Jankélévitch, Le Pardon, Paris, Aubier-Montaigne,…, c’est le pardon qui nous travaille, qui nous tiraille. Est-ce à dire que la chose à laquelle le mot impardon renvoie reste méconnue et l’idée qui grâce à lui se conçoit biscornue ? C’est tout le contraire et tout le paradoxe. Que nous ne pensions pas l’impardon ne veut pas dire que nous ne le pensons pas encore, mais que nous n’y pensons déjà plus.
4 Que désormais la chose soit pour ainsi dire rebattue lors même que son idée n’a donc pas été débattue s’explique très bien néanmoins : exigence d’une société qui, sous la « notion d’Imprescriptible [10][10]Ibid., p. 67. », a voulu l’organiser juridiquement, l’impardon est devenu une évidence. Et pour cause : n’avons-nous pas été mis face à l’impardonnable ? Et n’avons-nous pas dû faire face à l’impossible ? Face à l’impardonnable parce que le siècle révolu a vu le génocide des Arméniens par les Turcs, deux guerres mondiales, l’univers concentrationnaire nazi, le Goulag, les guerres post-coloniales d’Indochine ou d’Algérie, les guerres civiles et les exterminations massives au Biafra, au Cambodge ou au Rwanda, les dictatures répressives d’Amérique latine, la purification ethnique en ex-Yougoslavie, et bien d’autres crimes abominables – des crimes impardonnables dès lors qui, « visibles, connus », ne pouvaient plus être tus, en sorte qu’ils sont aujourd’hui encore « rappelés, nommés, archivés par une “conscience universelle” mieux informée que jamais [11][11]Jacques Derrida, Foi et savoir. Suivi de Le Siècle et le…. » Face à l’impossible parce que « ces crimes à la fois cruels et massifs » qui, « dans leur excès même », défient sinon défont « toute justice humaine », favorisent la prise de conscience de la puissance du pardon aussi bien que de notre impuissance devant lui, étant donné, on le sait, que d’un côté « le pardon pardonne seulement l’impardonnable » – puisqu’à quoi bon le pardon devant le pardonnable ? –, et que, de l’autre, l’impardonnable est essentiellement ce qui ne peut être pardonné – sans quoi, allons bon !, il irait contre sa définition – ; d’où suit que, n’étant « possible qu’à faire l’impossible » [12][12]Ibid., p. 108., le pardon s’avère ce à quoi nul n’est tenu. Est-ce à dire que l’idée qui grâce au mot impardon se conçoit est survenue trop tôt, cependant que la chose à laquelle il renvoie l’a été trop tard pour sa part ? C’est tout le contraire et tout le paradoxe. La chose devance le mot forgé pour s’en faire une idée. L’absence de pardon est donc première et elle l’est d’ailleurs tant que ce n’est pas parce qu’il y a de l’impardonnable qu’il y a de l’impardon, mais parce qu’il y a de l’impardon qu’il y a de l’impardonnable.
5 En traitant ici de l’impardon, nous procéderons donc à rebours de Jean-Baptiste Richard. Lui a eu l’idée du mot en partant de la chose [13][13]Dans l’avant-propos de sa première édition, Jean-Baptiste…, nous approfondirons l’idée de la chose en partant de ce mot. Pour ce faire, résumons en une phrase nos trois premières affirmations et mesurons la dernière. L’impardon est donc cette réalité sans nom, à laquelle nous ne pensons pas parce que plus et en vertu de laquelle une action est dite impardonnable. Aussi, loin que l’impardonnable soit la cause de l’impardon qui serait son effet, c’est l’inverse qui est vrai. Diderot confirmera, pour qui si « une action est impardonnable, c’est-à-dire qu’il n’y a point de pardon pour elle », il semble bien que « les hommes pétris d’imperfections, sujets à mille faiblesses, remplis de défauts, soient plus sévères dans leurs jugements que Dieu même », puisqu’« il n’y a point d’action impardonnable aux yeux de Dieu », alors qu’« il y en a que les hommes ne pardonnent jamais » [14][14]Denis Diderot, Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des…. Ainsi, l’impardonnable ne sanctionne pas les bornes du pardon – le pardon n’en a aucune –, mais nos limites à le donner – nous n’en avons que trop. Certes, quand nous atteignons les nôtres, l’impardonnable étend les siennes. Mais rien n’interdit que nous reculions celles-là et, ce faisant, que nous repoussions celles-ci. Que nous ne pardonnions pas tous, ni tout, ni à tous, ni toujours, ni tout de suite, ni toujours pour toujours et ce bien que tout nous y invite, ne saurait vouloir dire que nous ne le ferons jamais, et ce parce que tout nous y invite – on pardonne pour ne plus être la victime, ne pas devenir le bourreau, ne plus se rendre impardonnable, ne pas manquer d’être pardonné, bref, on pardonne par intérêt comme on pardonne par devoir, quand on pardonne parce qu’on pardonne, encore que pardonner à dessein ne soit pas pardonner, si bien que l’on croit pardonner quand on ne le fait pas. S’ensuit que l’impardon n’est pas universel, total, absolu, nécessaire, spontané, définitif et, par là même, que l’impardonnable est singulier, partiel, relatif, contingent, réfléchi, provisoire. En ce sens, l’impardonnable pourrait bien n’être rien en soi, à tout le moins rien d’autre que l’impardonné [15][15]Alors que Jankélévitch et Derrida, qui ont axé leurs….
6 Comme l’impardonnable en effet, l’impardonné résulte de l’impardon, c’est-à-dire de cette absence de pardon qu’il est non pas parce que le pardon manque, mais parce qu’on manque le pardon, manquant de le donner ou de le recevoir. Certes, il y a ceux qui pardonnent facilement [16][16]Ainsi Montesquieu : « Je pardonne aisément par la raison que je…… et il y a tous les autres, pour lesquels « il ne sera [jamais] question que de pardon difficile [17][17]Paul Ricœur, La Mémoire, l’histoire, l’oubli, Paris, Seuil,… ». Mais quand bien même « le monde est plein de gens qui ne pardonnent rien [18][18]Antoine Furetière, Dictionnaire universel contenant… », leur impardon dépendra encore des gens, « car tout ce que nous sommes / Lynx envers nos pareils, et taupes envers nous / Nous nous pardonnons tout, et rien aux autres hommes [19][19]Jean de La Fontaine, Fables (1668), dans Œuvres complètes,… ». En somme, pas d’impardon sans pardon. L’impardon n’est donc pas du pardon le défaut, mais sa privation. C’est pourquoi il se donne toujours à nous comme cette exception qui confirme la règle, celle selon laquelle c’est le pardon qui prévaut – et non pas parce qu’on le dit chrétiennement, mais parce qu’il le faut ontologiquement, étant bien clair que c’est parce qu’il le faut qu’on le dit et qu’on dit qu’il le faut. Se demandera-t-on alors à quel titre l’impardon est possible ? Non. Dans la mesure où l’impardon est (possible) quand le pardon n’est pas (possible), cherchons plutôt à savoir quand le pardon n’est pas possible. La question de l’impardon, dans ces conditions, devient celle des conditions du pardon. Toutefois, le soupçon interviendra aussitôt, dans la mesure où « le pardon ne connaît pas d’impossibilité [20][20]Vladimir Jankélévitch, Le Pardon, op. cit., p. 204. », dans la mesure où « un pardon digne de ce nom […] doit pardonner […] sans condition [21][21]Jacques Derrida, Foi et savoir. Suivi de Le Siècle et le… ». Certes, « pour rester tel », le pardon doit « s’affranchir de ses propres conditions de possibilité » [22][22]Jean-Luc Marion, Certitudes négatives, Paris, Grasset,…. Mais inconditionnel en théorie – c’est là qu’il prend son sens –, le pardon n’en est pas moins conditionnel en pratique – sans quoi il perd son sens. C’est que, même si en son sens le plus haut le pardon ne doit plus en avoir, il doit bien en avoir un pour qu’il fasse sens de le donner. De ce point de vue, l’essentiel n’est pas de savoir si l’impardonnable peut être pardonné [23][23]En droit, non, par définition – celle de l’impardonnable – ; en… – oui et non et réciproquement – mais s’il le doit – sans doute pas et en aucun cas [24][24]Il ne le doit ni du point de vue du pardon, ni du nôtre. Une…. Par où revient la possibilité, pour l’impardonnable, de n’être que l’impardonné.
7 Explicitons. L’impardonnable pourrait d’abord être l’impardonné quand nous ne voulons pas pardonner, parce que nous en voulons à qui nous a causé du tort, voire nous en cause encore, que nous lui en voulions ou de nous avoir fait du tort, ou d’avoir voulu le faire, ou de ne pas confesser ses torts, ou de ne pas vouloir le faire, c’est selon – ou cela tout à la fois. Telle est la force du ressentiment qui peut aller croissant selon les cas, les quatre évoqués pouvant donc s’ajouter les uns aux autres, quoiqu’ils soient à distinguer deux à deux. D’un côté en effet, le mal commis et l’irrepentance, qui suscitent chez la victime de la rancœur, cette « haine cachée et invétérée qu’on garde dans le cœur [25][25]Émile Littré, Dictionnaire de la langue française, Paris,… » en raison de ce qu’on a gros sur lui : la désillusion éprouvée – autrui nous a offensé sans que nous ne l’ayons fait –, voire l’injustice redoublée – autrui nous offensera de ne pas reconnaître qu’il l’a fait – ; de l’autre, le mal choisi et l’impénitence, qui entraînent chez la victime de la rancune, cette « haine cachée et invétérée, qu’on garde dans le cœur jusqu’à ce qu’on trouve occasion de se venger [26][26]Antoine Furetière, Dictionnaire universel, op. cit., t. 3, art.… » de celui qui en est l’objet – il l’aura bien mérité puisqu’il l’a bien cherché – et qui fait tout pour le rester – il faudra bien qu’il nous “trouve” puisqu’il nous “cherche” encore. Ainsi, par rancœur ou rancune [27][27]Que les mots puissent être employés l’un pour l’autre…, la victime peut ne pas pardonner parce qu’elle ne veut pas le pardon, ne voulant souvent même pas en entendre parler quand on lui en parle, puisqu’elle reporte sur lui ou sur autrui son impossibilité. De son point de vue, que le pardon ne puisse être accordé n’est pas de son fait, mais dû au fait que ses conditions ne sont pas réunies, la première d’entre elles n’étant pas remplie par celui-là même à qui il faudrait l’accorder. Sous cet angle, ne peut être pardonné que qui veut l’être, et donc demande non à l’être, mais demande le pardon lui-même. L’impardon résulte ici du refus du pardon, qui résulte lui-même de l’application, plus méchante que bête, de ce principe de justice présidant aux échanges selon lequel on n’a rien sans rien. Bref, de même que pas de bras, pas de chocolat, de même pas de supplication, pas d’absolution..
samedi 9 décembre 2023
Rubrique nécrologique Jules Léon COTTET 1835-1913 ( publiée dans l’Illinois State Journal le 2 juin 1913 )
Jules Léon COTTET 1835-1913
Les funérailles de feu Jules Leon COTTET, résident très connu et respecté de cette ville (Springfield), se sont déroulées à Los Angeles, le lundi 26 mai 1913 à 14h30. Une courte mais belle cérémonie, respectant le rituel funéraire ingersollien, a été conduite par la Société Libérale de cette ville. Le corps a été transporté de la chambre funéraire jusqu’au crématorium. La crémation s’est faite dans l’intimité.
M. COTTET est arrivé à Los Angeles le 27 avril, accompagné de son épouse et de sa fille Julie. Il avait une santé défaillante depuis quelque temps et le climat rigoureux et les changements soudains de température lui étaient très néfastes, il pensait améliorer son état en se rendant en Californie. Ils arrivèrent à Los Angeles le 30 avril. Le lundi suivant, M. COTTET était frappé d’apoplexie. Il fut très malade pendant près de trois semaines, déclinant progressivement jusqu’à sa disparition le 24 mai. .
M. COTTET était né à Troyes, France, en 1835. Son père Ambroise Napoléon COTTET, était un éminent professeur et un savant à cette époque. Son fils Jules fut très tôt connu comme le « vieux jeune homme », eu égard à sa maturité d’esprit et à son comportement largement dus au fait qu’il était le compagnon de tous les instants de son père et son associé scientifique.
M. COTTET a reçu sa prime éducation dans l’école où son père était professeur de mathématiques. Puis à Châlons sur Marne, dans une institution qui a encore une réputation mondiale, et qu’il intégra en 1847 à l’âge de douze ans (vraisemblablement l’Ecole mutuelle primaire préparant à l’Ecole Royale des Arts et Métiers).
Nombre d’incidents marquants étaient déjà intervenus dans sa courte jeunesse pour le rendre digne de porter son surnom de « vieux jeune homme ». Son grand-père, un vétéran de Napoléon Ier, voulait en faire un marin. Il s’essaya à la navigation maritime pendant une courte période, mais il ne trouva jamais son pied marin. Le travail qu’on lui demandait, il aurait pu l’accomplir à terre, mais le mal de mer mit un terme à sa carrière navale.
Pendant qu’il suivait ses études dans l’école de Châlons il fit connaissance pour la première fois avec le goût de la guerre. Le 18 septembre 1848, un soulèvement révolutionnaire survint à Francfort sur le Main, son objectif était d’obtenir une Assemblée nationale et une république allemandes.
M. COTTET et plusieurs de ses condisciples partirent pour l’Allemagne. En arrivant à Mayence, ils trouvèrent une ville complètement désorganisée, sans chef, ni dirigeant. Les garçons ne purent franchir à nouveau le Rhin, les Prussiens étaient entre eux et leur patrie. Ils craignirent d’être arrêtés en France, et ils partirent vers le sud du Rhin vers la Suisse. Là ils rencontrèrent les officiers recruteurs de GARIBALDI qui les enrôlèrent sous leur bannière.
A ce moment, le mouvement libéral à Rome était devenu trop puissant pour être contrôlé par le Pape. Le comte ROSSI, un farouche opposant du mouvement libéral, fut nommé chef du gouvernement. Le peuple de Rome en fut indigné. Le 15 novembre 1848, ROSSI était assassiné sur les marches de l’Assemblée. Les troupes républicaines de GARIBALDI marchèrent sur le Palais pontifical, un combat au corps à corps avec la Garde pontificale s’en suivit. M. COTTET et ses camarades y participèrent. Il en fut décoré ultérieurement par GARIBALDI pour avoir fait un prisonnier.
Le Pape prit la fuite le 23 novembre. Il demanda l’assistance des puissances catholiques. En avril 1849 la France républicaine envoya le général OUDINOT et 4 000 hommes contre Rome. GARIBALDI s’échappa pendant le siège. Les jeunes soldats français n’eurent guère le choix.
Rester dans la ville et être faits prisonniers par les soldats français, cela aurait été dur pour eux. Tenter de s’échapper et c’était presque une mort certaine. M. COTTET fut caché quelques jours par une famille accueillante, et finalement il s’échappa et fit son retour en France. Grâce aux efforts combinés de son père et de ses amis, il évita les conséquences néfastes de son escapade. Il réintégra son école, mais il fut pris une nouvelle fois dans les tourments de la guerre.
Le 2 décembre 1851, Napoléon III renversa la République française et se proclama empereur. Dans les combats sur les barricades le frère aîné de M. COTTET, Jules Pierre, fut tué. Tous les républicains furent arrêtés dans leur lit, et parmi eux, M. COTTET et son père. Sans procès d’aucune sorte ils furent numérotés et jetés en prison pour y attendre la mort. Chaque jour, des nombres étaient appelés, ceux qui portaient ces nombres étaient extraits et fusillés. La misère dans ces geôles était terrible. Ceux qui restèrent furent transportés en Algérie après un certain temps.
Près d’Alger, M. COTTET et son père, avec beaucoup d’autres, furent emprisonnés au Camp de Birkadem. Là encore souffrances et morts frappèrent. Une épidémie de choléra survint, les bien-portants devaient secourir les malades. Le fils, Jules, fut chargé de coudre les sacs dans lesquels les cadavres étaient mis avant d’être enterrés. Le choléra l’épargna, mais il eut la dysenterie qui faillit l’emporter. Sans les efforts amicaux d’un arabe influent qui l’hébergea dans sa tente et prit soin de lui, il aurait succombé.
Les quelques prisonniers encore vivants obtinrent la ville comme prison jusqu’à ce que de nouveaux troubles en France provoquèrent leur enfermement au fort Bab-Azoun, un fort construit juste au-dessus de la mer.
C’est de cet endroit, que M. COTTET fit ses adieux à son père, il plongea dans la mer avec plusieurs camarades assez audacieux pour tenter une évasion. Ils furent repêchés par un petit bateau qui les déposa en Espagne. Ils traversèrent l’Espagne et le Portugal à pied. Dans un petit port près de San Sebastian, il embarqua dans un petit bateau à voile arborant le drapeau « stars and stripes ». Quarante-quatre jours de traversée pour rejoindre le port de la Nouvelle-Orléans, 44 jours avec un mal de mer incessant pour le jeune fugitif. Il débarqua le 24 octobre 1854 à la Nouvelle-Orléans. Il n’y resta que quelques jours puis il se rendit à Saint Louis pour y trouver du travail.
Plus tard, il se prit d’intérêt pour la Société icarienne, fondée par Etienne CABET à Nauvoo, Illinois, il s’y rendit pour y devenir membre, occupa la fonction de secrétaire pendant un temps. Pendant son séjour dans la société il épousa Irma JONVAUX. Quand la société se scinda, il retourna avec sa femme à Saint Louis. Il vécut un moment dans une ferme à l’embouchure de la rivière Illinois.
Quand la guerre civile éclata il vint à Springfield et s’enrôla dans le régiment Vaughn. Il servit deux ans, ses activités étant localisées à l’ouest, au Tennessee, à l’Arkansas… Il fut nommé capitaine de la 44ème Unité régulière de l’infanterie de couleur. Sa connaissance approfondie des tactiques militaires et de la pratique du sabre le porta en avant comme un maître instructeur prenant autant de responsabilités qu’il pouvait en assumer. Nombre de soldats qu’il forma se souvenaient avec respect du « Yankee français », nom sous lequel il fut bientôt connu. Ses amis parlent de ses exploits audacieux pendant cette période de sa vie, et certains se souviennent de sa sévérité envers les soldats sans loi, de sa justice stricte, envers tous hommes de couleur ou blancs. Il était bien appréciés par les hommes éminents de cette époque, LINCOLN y compris.
Après la guerre il eut pendant de nombreuses années un atelier de serrurerie sur la Quatrième rue, à l’arrière du lycée. Il devint aussi membre de la brigade des pompiers, responsable technique de la vieille pompe à incendie Silsby de la caserne n°2. Il se consacrait à ce vieil équipement. Bien des années après qu’il eut quitté la brigade du feu, il continua à travailler en extra sur le moteur Silsby. Le dernier incendie pour lequel il fit fonctionner la pompe Silsby toute une nuit avec de bons résultats fut celui du parc de poutres Vredenburgh en janvier 1904. Dans sa profession, il était un adepte du paiement comptant et des affaires saines ; dans ses relations avec le conseil municipal il était viscéralement opposé aux abus de pouvoir.
M. COTTET a eu une santé chancelante pendant quelque temps, il espéra qu’un changement de climat pourrait lui être salutaire et il partit pour Los Angeles le 27 avril. Une semaine plus tard il était victime d’hémorragies cérébrales. Son état empira jusqu’à son décès, le samedi 24 mai.
Sa première femme mourût lorsqu’il vivait sur la Quatrième avenue, le laissant avec deux enfants Eugene et Leonie. Il épousa en secondes noces, Clara WOLPERT de Belleville. De cette union naquirent deux filles, Julie, maintenant à Los Angeles, et Felicie, devenue Mme Ernest B. SNIDER de notre ville (Springfield).
En 1884, il acquit une ferme fruitière à l’ouest de notre ville, il y vécut jusqu’en 1904, il revint au centre-ville, acheta une maison 810 Park avenue, où il vécut jusqu’à son récent départ pour Los Angeles.
M. COTTET laisse derrière lui sa femme, Mme veuve Jules Leon COTTET, sa fille, Julie, toutes deux à Los Angeles ; un fils Eugene de Bloomington ; une fille, Mme Ernest B. SNIDER de Springfield, et sept petits-enfants, Jules Eugene COTTET de Springfield, Viola, Julie, Laura, Lavery et Merritt COTTET de Bloomington et Virginia Louise SNIDER de Springfield.
(ingersollien d’après Robert Green INGERSOLL 1833-1899 colonel, avocat, libre-penseur, agnostique)